Prothèses mammaires frauduleuses: 4 ans fermes requis contre le patron de PIP

Sous sa férule, la société PIP a fabriqué et écoulé des dizaines de milliers de prothèses mammaires frauduleuses, véritables « bombes à retardement » pour les femmes qui les portent: la justice a requis quatre ans de prison ferme contre Jean-Claude Mas, au terme de son procès en appel.

L’ancien épicier, « vendeur de saucisson, de vin et de cognac » devenu, en foulant aux pieds toute espèce de règlementation sanitaire, l’un des plus importants fabricants d’implants mammaires au monde, avait déjà été condamné en première instance à une peine identique.

Devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), l’avocat général Pierre-Jean Gaury a demandé qu’il soit condamné à nouveau pour fraude aggravée, et pour escroquerie à l’égard de la société allemande de certification TÜV, qu’il a bernée sur la composition de son gel pendant des années.

Et requis, en sus de la prison, une amende de 75.000 euros et l’interdiction définitive d’exercer dans le domaine de la santé et de gérer une société.

A l’encontre de quatre autres cadres dirigeants, il a demandé au tribunal de confirmer ou légèrement aggraver les peines de première instance, prononcées en 2013. Ses réquisitions vont de 18 mois de prison avec sursis pour le directeur technique à 4 ans, dont une partie ferme, pour le président du directoire.

« Le fait d’utiliser une matière première non conforme, non testée, selon un processus de fabrication artisanal, en variant les proportions et les compositions (…) est générateur d’un risque » pour la santé des femmes implantées, souligne le réquisitoire.

Au cours de ce procès en appel, M. Mas, 76 ans, a encore martelé que son gel de silicone « maison », fabriqué à partir d’huile industrielle, ne comportait aucun danger..

L’avocat général a martelé que M. Mas n’avait « rien d’un scientifique: son seul souci est financier », son gel était sept fois moins cher à produire que celui, homologué, qu’il aurait dû acheter. Les prothèses PIP « craquaient » bien plus souvent que celles des autres marques, alimentant les plaintes des chirurgiens et finissant pas alerter les autorités sanitaires qui découvrent en 2010 le pot-aux-roses.

Preuve qu’il avait conscience de sa fraude, Mas se tenait informé immédiatement des visites de contrôle dans son entreprise, « même s’il était à l’autre bout du monde » et demandait à ses troupes de dissimuler documents et containers de produits interdits.

Dans ce procès hors norme, quelque 7.000 femmes se sont portées parties civiles, évoquant pour l’une « une bombe à retardement » installée dans son corps, pour d’autres des « vies gâchées ». « Ils ont fait de nous 7.000 rats de laboratoire », dira une victime.

Les employés, pour beaucoup « dociles et inexpérimentés » pour mieux obéir à un patron tyrannique, selon leurs témoignages, ont raconté une entreprise entièrement soumise à son fondateur, qui ne tolérait pas la critique, et surtout pas sur son gel, « le meilleur du monde ».

Au total, des dizaines de milliers de prothèses mammaires frauduleuses ont été écoulées dans le monde entier, notamment en Amérique du Sud. Les autorités sanitaires françaises font état de 18.000 femmes qui ont dû se faire retirer leurs prothèses, pour partie suite à des ruptures ou des irritations. Deux cancers ont été diagnostiqués.

Les plaidoiries de la défense sont attendues et le jugement devrait ensuite être mis en délibéré. Le parcours judiciaire de Jean-Claude Mas n’en sera pas terminé pour autant : il est toujours mis en examen dans deux procédures, l’une pour homicide et blessures involontaires, l’autre concernant les aspects financiers de l’affaire.

Source : www.linternaute.com (24/11/2015)

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