Indemnisation d’un enfant traumatisé crânien
En 2003, dans le nord de la France, un enfant âgé de 10 ans est victime d’un grave accident de la circulation, ses séquelles sont celles d’un traumatisme crânien grave. Dans un premier temps, les parents de l’enfant faisaient appel à un avocat qui obtenait du Président du Tribunal de Grande Instance de Thionville, d’une part la mise en place d’une expertise médicale et d’autre part, différentes provisions totalisant la somme de 265.000€ pour l’enfant.
En janvier 2014, les parents de l’enfant estimaient qu’il convenait de faire appel à un avocat spécialisé en droit du dommage corporel et décidaient de changer d’avocat. Après examen du dossier, l’avocat spécialisé acceptait sa mission et informait les parents qu’il fallait intégralement revoir la défense du dossier, la procédure et l’expertise médicale. Il intervenait immédiatement auprès du magistrat chargé du contrôle des expertises près le Tribunal de Grande Instance de Thionville et proposait que soit désigné en remplacement de l’expert judiciaire défaillant, un expert judiciaire neurologue parisien notoirement réputé. En mars 2014, le magistrat faisait droit à la demande de l’avocat et désignait cet expert.
A ce stade de la procédure, il fallait impérativement reprendre l’intégralité du dossier, le remettre à plat et retracer le parcours médical, familial et social de l’enfant des 10 dernières années. L’avocat spécialisé désignait ensuite avec l’accord de la famille un médecin conseil de victimes qui assisterait, avec l’avocat, la victime au cours de l’expertise médicale. Après examen, ce médecin déposait un rapport. De son côté, l’avocat spécialisé reprenait tout le parcours médical de l’enfant et sollicitait des différents hôpitaux et centres de rééducation des relevés de présence très précis sur 10 années afin de pouvoir obtenir une tierce personne pour cette période, sachant que l’enfant était revenu à domicile partiellement puis définitivement.
En janvier 2015, une fois le dossier entièrement refait et complété avec plus d’une soixantaine de pièces communiquées par la victime à l’expert judiciaire et aux parties adverses, l’expert convoquait les parties. Lors de cette réunion, toutes les parties étaient représentées : la victime et ses parents étaient assistés par l’avocat spécialisé et le médecin conseil de victimes, quant aux compagnies d’assurances et leurs inspecteurs, elles étaient représentées par trois médecins experts et des avocats.
Cette expertise fut difficile, les parties exposaient leurs demandes qui étaient très différentes. L’avocat spécialisé et le médecin conseil assistant la victime défendaient leur point de vue sur l’évaluation du dommage corporel, les trois médecins conseils des compagnies d’assurances et leurs avocats avaient une vue bien différente et minimisaient le dommage. Il appartenait ensuite à l’expert judiciaire de donner son avis et d’évaluer le dommage corporel de la victime.
En février 2015, l’avocat de la victime adressait un dire à l’expert judiciaire lui demandant de tenir compte de la tierce personne de l’enfant pendant ces 12 dernières années, relatant très précisément son parcours et sa qualification ainsi que celui de la reprise de l’activité professionnelle à mi-temps en mars 2013 et donnait son avis sur celle-ci. Que de même, les compagnies d’assurances adressaient également deux dires à l’expert judiciaire. Il convient de rappeler que la production de dires est essentielle car elle permet à une partie de prendre position sur le dossier et d’exposer ses prétentions expertales non pas oralement mais par écrit. Aux termes de la loi, l’expert judiciaire est tenu d’annexer le dire des parties à son rapport et surtout d’y répondre. Le dire est donc important car il permet de rappeler par écrit certains échanges et points de vue et de présenter son avis par écrit et surtout d’obtenir une réponse de l’expert judiciaire. Il est en effet difficile de discuter ou de critiquer après coup un rapport d’expertise devant une juridiction, si ce travail n’a pas déjà été fait par l’avocat à l’appui d’un dire.
En mai 2015, l’expert judiciaire déposait un pré-rapport très complet d’une trentaine de pages répondant favorablement au dire de la victime sur son parcours médical et familial depuis 12 ans. Le travail en amont était récompensé. En juin 2015, l’avocat de la victime adressait à l’expert judiciaire un deuxième dire, très détaillé relatif à la tierce personne, à sa qualification, à sa durée, durant toute la période de 2003 à 2015. Ce dire discutait aussi de l’activité scolaire puis professionnelle depuis 2013. En octobre 2015, l’expert déposait son rapport définitif en tenant compte des observations et des dires de la victime après avoir estimé celui-ci comme consolidé évaluait son taux d’invalidité (DFP) à 80% avec un besoin en tierce personne de 8 heures actives par jour et retenant, notamment, un emploi en milieu protégé à temps partiel.
Une fois le rapport médical de consolidation déposé, il convenait de saisir le bon tribunal pour solliciter la liquidation du dommage corporel de la victime. L’avocat spécialisé décidait alors de ne pas poursuivre le procès devant le Tribunal de Grande Instance de Thionville et préférait délocaliser le litige pour saisir le Tribunal de Grande Instance de Paris. La juridiction parisienne a une chambre spécialisée en la matière, sa jurisprudence est riche pour les victimes d’un dommage corporel. En janvier 2016, compte tenu de l’option de compétence territoriale, l’avocat spécialisé assignait notamment les compagnies d’assurances devant le Tribunal de Grande Instance de Paris pour obtenir la liquidation du dommage de son client et de sa famille. Devant le Tribunal, plusieurs jeux de conclusions furent échangés entre les parties, les compagnies contestaient les demandes de la victime et de ses parents. Le dernier jeu de conclusions de la victime déposé par l’avocat spécialisé, détaillant toutes ses demandes, comprenait 86 pages et 150 pièces communiquées. Tous les postes de préjudices ont été contestés par les compagnies d’assurances qui sollicitaient même un sursis à statuer sur le préjudice professionnel de la victime en attente de son orientation définitive ce qui a pour conséquence de retarder encore de plusieurs années la liquidation du dommage corporel. Bien évidement l’avocat spécialisé s’est opposé à cette demande.
En février 2017, l’affaire fut longuement plaidée, l’avocat spécialisé comme ses confrères remettaient un volumineux dossier de plaidoirie au tribunal. En mars 2017, le Tribunal de Grande Instance de Paris rendait un jugement qui faisait droit aux demandes de la victime et déboutait les compagnies d’assurances de leurs offres indemnitaires et de leur demande de sursis à statuer. Le tribunal allouait à la victime au titre de l’indemnisation de son préjudice corporel la somme totale de plus de 4.860.000€, comprenant d’une part, une somme en capital de plus de 2.600.000€ et d’autre part, au titre de la tierce personne, une rente annuelle et viagère de 58.000€, représentant une somme capitalisée de plus de 2.260.000€. Le Tribunal a également alloué une bonne indemnisation aux parents de la victime, soit 180.000€ pour l’un des parents en tenant compte également de sa perte de revenus professionnels et 40.000 euros pour l’autre parent.
Il convient de préciser que le jugement est définitif et que la victime a pu obtenir du tribunal, une indemnisation de plus de 4.860.000€, alors que les compagnies d’assurances limitaient leur offre dans les écritures à la somme en capital de 1.195.000€, sans compter la contestation de la tierce personne qui était également très importante puisque la victime obtenait au tribunal 20€ de l’heure, alors que les compagnies d’assurances offraient un taux horaire de 15€.
Il est certain que si la victime s’était défendue seule à titre amiable avec les compagnies d’assurances, elle aurait obtenu nettement moins que les offres qu’elles ont présentées devant le tribunal. Le différentiel aurait été nettement plus important. La victime a donc bien fait de faire appel à un avocat spécialisé, elle a obtenu gain de cause et ce sans discussion. L’avocat spécialisé remercie la victime et sa famille qui lui ont fait confiance, leur souhaite bonne chance et se réjouit de savoir que son jeune client est maintenant à l’abri du besoin et qu’il pourra entreprendre ce qu’il désire.
Source : Catherine Meimon Nisenbaum (août 2017)
<< Autres articles